Présentation de l'éditeur :
Forcée d'épouser un homme de trente ans son aîné, Mariam ne parvient pas à lui donner un fils. Après dix-huit années de soumission à cet homme brutal, elle doit endurer une nouvelle épreuve : l'arrivée sous son propre toit de Laila, une petite voisine de quatorze ans. Enceinte, Laila met au monde une fille. D'abord rongée par la jalousie, Mariam va finir par trouver une alliée en sa rivale. Toutes deux victimes de la violence et de la misogynie de leur mari, elles vont unir leur courage pour tenter de fuir l'Afghanistan. Mais parviendront-elles à s'arracher à cette terre afghane sacrifiée, et à leur ville, Kaboul, celle qui dissimulait autrefois derrière ses murs " mille soleils splendides " ?
Ma lecture :
J'ai découvert ce livre en cherchant un ouvrage dont le titre contiendrait le mot "soleil" de façon a participer au challenge proposé par Calypso "Un mot, des titres". C'est la couverture de ce livre qui m'a frappée : elle m'est apparue tellement lumineuse ! Je n'avais pas vraiment vu ces deux femmes voilées dont la couleur du hijab se confond avec la couleur du ciel. Elles paraissent transparentes. Ce n'est pas elles et leur voile que j'ai remarqué sur cette couverture, mais ce ciel bleu et le titre, en jaune, couleur du soleil. Une couverture lumineuse, pleine d'énergie et d'espoir probablement.
Je n'ai pas pris le temps de lire ce livre pour être dans le délai du challenge de Calypso. Peu importe, je l'ai dévoré depuis !
C'est une lecture que je vous recommande vivement.
L'intrigue est construite en trois séquences. Dans la première, on rencontre Mariam, une petite fille harami (bâtarde). Sa vie est pleine de l'attente des visites hebdomadaires de son père et de l'espoir que celles-ci suscitent. Mais un jour, sa vie bascule et elle est mariée contre son gré à Rachid, un homme au "visage carré et rougeaud, (avec) un nez crochu, des joues rouges suggérant une gaieté sournoise, dans yeux injectés de sang, des dents qui se chevauchaient - en particulier les deux de devant, serrées l'une contre l'autre tel un toit en pignon -, et enfin un front si bas que deux doigts à peine y séparaient les sourcils brousailleux d'une épaisse tignasse poivre et sel." Mariam a tout juste 15 ans. Et c'est sa vie que nous partageons au fil des pages. Une vie de recluse, de femme voilée de la burqa, de femme soumise, malmenée et brutalisée. Mariam encaisse et jamais ne se révolte.
La ville de Hérat où est née Mariam en 1959.
Détail de la mosquée de Hérat
La seconde séquence nous fait partager l'existence de Laila, une jeune fille née la nuit du coup d'état du 27 avril 1978. Son père est un ancien professeur, sa mère une femme de caractère qui s'est effondrée et vit au fond de son lit depuis le départ de ses deux garçons partis faire la guerre. Laila mène une vie ordinaire auprès de ses parents et de son camarade Tariq. Son père place beaucoup d'espoirs en elle : "Tu pourras faire ce que tu veux plus tard, Laila. Je le sais. Et je sais aussi que lorsque cette guerre sera terminée, l'Afghanistan aura besoin de toi." Mais là, encore, les choses ne sont pas si simples dans un pays en guerre. Dans un pays comme l'Afghanistan. Et Laila se retrouve elle aussi mariée à Rachid.
L'un des bouddhas du site de Bâmiyân où se rendit Laila en compagnie de son père et de Tariq,
avant qu'ils ne soit détruits par les Talibans en mars 2001.
C'est alors la troisième séquence du roman. La rencontre entre Mariam et Laila sous le toit de Rachid. Leur confrontation aussi. Et puis, la naissance de Aziza, la fille de Laila. A partir de là, le roman prend une autre dimension. Encore plus sensible et pleine d'espoir. L'évoquation de cette maternité partagée entre ces deux femmes confrontées à une même souffrance est très belle. La vie n'en est pas moins douloureuse, cruelle même lorsqu'il s'agit de se séparer de l'enfant pour ne pas mourir de faim et lui donner, à elle aussi, une chance de survivre. A partir de là, j'ai englouti les pages dans l'espoir d'un dénouement heureux.
Mais je ne vous raconterai pas la fin, je vous conseille juste de la lire.
Cette histoire, est une histoire de femmes avant tout. Mais c'est aussi celle d'un pays que l'on découvre et que l'on apprend à voir avec d'autres yeux que ceux des médias qui ne nous donnent qu'une image de guerre et de brutalité. C'est ce que l'on retient aussi de la couverture : une impression de lumière et d'énergie, alors que ces femmes qui traversent devant nos yeux sont entièrement voilées. De la naissance de Mariam au printemps 1959 à la conclusion du roman en 2003, c'est toute l'histoire tourmentée de l'Afghanistant qui nous est racontée. La place des différents chefs de guerre, des occidentaux et des soviétiques, des différentes idéologies en opposition au sein de la population... C'est à travers cette histoire que l'on se rapproche de cette population martyre dont on ne nous parle jamais : celle qui subit la violence et la destruction de son pays, victime des guerres que se mènent des camps dans lesquels peu semblent se reconnaître et qui tente de poursuivre un semblant d'existence "normale", qui essaye de donner la vie dans des conditions si dramatiques.
Bref, un roman à découvrir.
Quelques extraits :
"C'est vrai. Elle ne s'en souvenait pas du tout. Et alors même qu'elle devait passer ses quinze premières années juste à côté d'Herat, Mariam ne vit jamais ce fameux pistachier - pas plus qu'elle ne vit de près les célèbres minarets, qu'elle ne cueillit de fruits dans les vergers ou qu'elle ne se promena dans les champs de blé. Mais chaque fois que Jalil s'adressait à elle sur ce ton, elle buvait ses paroles avec émerveillement, admirative devant l'étendue de ses connaissances. Elle éprouvait alors un frisson de fierté à l'idée d'avoir un père qui savait autant de choses."(Mille soleils splendides - Khaled Hosseini ; éd. 10/18 ; 8 janvier 2009 ; p.11)
"Lorsqu'elle se représentait son bébé, son coeur gonflait dans sa poitrine. Il gonflait, et gonflait, et gonflait encore, jusqu'à effacer toutes les pertes, tous les chagrins, toute la solitude et les humiliations dont elle avait souffert. Telle était la raison pour laquelle Dieu l'avait conduite ici, à l'autre bout du pays. Elle en était certaine à présent." (Mille soleils splendides - Khaled Hosseini ; éd. 10/18 ; 8 janvier 2009 ; p.92)
"Mais Aziza se contentait de gazouiller avec ravissement et se blotissait encore plus contre elle. Mariam en avait chaque fois le vertige. Les larmes aux yeux, elle avait l'impression que son coeur décollait de sa poitrine. Et elle s'émerveillat de voir que, après des années sans attaches, elle qui n'avait jamais connu que des relations faussées ou avortées pouvait enfin en nouer une sincère avec cet être minuscule." (Mille soleils splendides - Khaled Hosseini ; éd. 10/18 ; 8 janvier 2009 ; p.249)
Petite fille Afghane, prise en photo par Réza, photographe et journaliste français d'origine iranienne.